France – 30/01/2025 – energiesdelamer.eu.

 

Séverine Michalak, notre juriste expert, a contribué à une réflexion collective sur la notion de gouvernance portuaire, dirigée par le laboratoire CERMUD de l’Université du Havre Normandie. L’ouvrage « La gouvernance portuaire : pouvoir, intérêts, représentations » vient de paraître sous la direction scientifique de Nicolas Guillet.

Sa contribution porte notamment sur le renouvellement de la gouvernance portuaire créée par l’aménagement des ports pour les EMR, dans une optique collaborative et décentralisatrice, afin de faciliter la transition énergétique des ports.

Cette réflexion complète et enrichit les travaux menés par ailleurs dans le cadre des publications de MerVeille Énergie sur la transition énergétique des ports, et leur contribution à l’essor des EMR.

 

Le Centre de recherche sur les mutations du droit et les mutations sociales (CERMUD) a organisé un colloque sur « La gouvernance portuaire : pouvoir, intérêts, représentations » les 3 et 4 mars 2022.

Ce thème s’insère dans les axes du laboratoire car la thématique de la gouvernance s’inscrit bien dans une mutation des modes d’organisation d’un nombre de plus en plus important d’institutions, privées mais aussi publiques.

L’intérêt scientifique pour le thème de la gouvernance portuaire est apparu avec un regain d’intérêt politique pour les questions maritimes (mais aussi fluviales) en France dans les dernières années. Il fait suite au dépôt d’une Proposition de loi relative à la gouvernance et à la performance des ports maritimes français et son adoption en première lecture par l’assemblée sénatoriale le 8 décembre 2020, ainsi qu’à la présentation de la « Stratégie nationale portuaire » devant le Comité interministériel de la mer (CImer) le 22 janvier 2021 par le gouvernement français. De même, il trouve un écho contemporain dans le processus d’aménagement des ports fluviaux qui se déploie par l’intervention d’une pluralité d’acteurs : en parallèle de l’ambition d’accroissement du transport fluvial, la loi favorise le développement des différents usages des voies navigables (activités nautiques, tourisme fluvial, logistique urbaine, fret de marchandises, transport de passagers…).

La gouvernance est une notion qui renvoie à un exercice du pouvoir par plusieurs acteurs et qui privilégie une perspective en termes de processus (E. Dau, « Gouvernance », in N. Kada et M. Mathieu (dir.), Dictionnaire d’administration publique, Grenoble, PUG, Coll. « Droit et action publique », 2014, p. 249).

Elle entend offrir la possibilité aux autorités de direction de mieux associer l’ensemble des participants d’un domaine considéré à la prise de décision. Elle participe d’un « pilotage » des institutions administratives ou d’une activité sociale qui prétend être plus efficace en associant les différents acteurs du jeu concerné – sans d’ailleurs nécessairement qu’ils tirent leur légitimité du processus électif.

On parle ainsi de corporate governance ou bien de gouvernance mondiale. En particulier, la gouvernance permettrait une démarche horizontale de concertation visant à réguler les tensions entre les acteurs, gommer les antagonismes entre leurs intérêts concurrents, bref : « atténuer les conflits » (O. E. Williamson, cité par O. Weinstein, « Gouvernance », in M. Cornu, F. Orsi et J. Rochfeld, Dictionnaire des biens communs, Paris PUF, coll. « Quadrige », 2017, p. 602). La gouvernance serait aussi « une façon de nier la nécessité d’un gouvernement central » (M. Delmas-Marty, La refondation des pouvoirs. Les forces imaginantes du droit (III), Paris, Seuil, coll. « La couleur des idées », 2007, p. 73).

La gouvernance opère donc des effets juridiques sur les institutions, leurs modes d’organisation comme leur fonctionnement, en privilégiant une structure en réseau à une structure hiérarchique. Elle invite alors à s’interroger sur la représentation de ceux que la gouvernance inclut. Mais la gouvernance joue également sur les formes de production de la norme juridique : elle privilégie l’informel et le consensus à la procédure codifiée et à la règle de la majorité.

Enfin, la gouvernance intéresse par son contenu, c’est-à-dire l’objet sur lequel elle s’applique. Appliquée aux ports, la notion de gouvernance paraît adaptée tant la réalité portuaire est faite d’une multitude d’acteurs qui interviennent dans l’exploitation, la conservation, la gestion, l’administration, la valorisation, des espaces portuaires.

Ces institutions et personnes juridiques poursuivent chacune des finalités propres, parfois concurrentes, qu’il s’agit de conjuguer, d’articuler, par des règles juridiques adaptées[1]. La diversité des ports (maritimes et fluviaux), de leurs propriétaires et exploitants, permet d’envisager des comparaisons dans les modes de gouvernance, dans le champ fluvial et le champ maritime et à l’intérieur de chaque champ.

Le colloque avait revendiqué une perspective pluridisciplinaire puisque, si la gouvernance portuaire implique une approche juridique pour examiner la manière institutionnelle de l’organiser (statuts, compétences, procédures), elle nécessite également une approche sociologique pour comprendre le jeu des acteurs dans le champ portuaire, ainsi qu’un examen de la gouvernance portuaire à travers l’histoire.

L’attention des contributeurs avait été attirée sur la dimension écologique de la gouvernance portuaire car elle est probablement celle la moins développée dans les contributions déjà obtenues.

Les contributeurs sont aussi invités à envisager le cas des ports fluviaux dès lors que leurs exploitants, qu’il s’agisse de Voies navigables de France ou bien des collectivités territoriales et leurs regroupements, semblent mieux outillés juridiquement que les exploitants des ports maritimes pour garantir un « développement durable » des espaces portuaires fluviaux.

Enfin, une troisième direction serait celle de la notion de « bien commun » : ne peut-on, en suivant les analyses d’Elinor Ostrom (Governing the Commons: The Evolution of Institutions for Collective Action, New York, Cambridge University Press, 1990) et Benjamin Coriat (Le retour des communs. La crise de l’idéologie propriétaire, Paris, éd. Les liens qui libèrent, 2015), considérer les ports comme une ressource commune, gérée par un système de règles partagé et un mode de gouvernance associant les diverses institutions qui y œuvrent ? La qualification des ports comme bien commun emporterait-elle alors des effets en terme de leur gouvernance ?

 

POINTS DE REPÈRE

Le trimestriel MerVeille Energie publie tous les ans un dossier à l’occasion des assises « Port du Futur » organisées par le CEREMA.

 

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