Monde ONU – 07/03/2022 – energiesdelamer.eu. Le « Traité pour la haute mer » en cours d’élaboration est amené à jouer un rôle majeur pour mieux protéger cette moitié des océans située au-delà des 200 milles marins, aujourd’hui zone de non droit.
Le nouveau round de négociations s’ouvre ce lundi à l’ONU sur le futur traité international de protection de la haute mer. Les Etats doivent en finaliser le texte en 2022.
Interrompues par la pandémie, les négociations pour l’élaboration d’un traité sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer reprennent ce 7 mars pour deux semaines.
Cette quatrième séance est censée être la dernière, mais nombre de points restent à préciser.
C’est seulement dans les années 1990/2000 que les découvertes scientifiques et les progrès techniques révèlent la potentielle richesse de la biodiversité en haute mer. Cette zone située au-delà des 200 milles marins (370 km) en dehors des juridictions nationales (dite « area beyond national juridiction » ou ABNJ), qui représente plus de la moitié des océans et les ¾ de la planète, n’est pas couverte par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (United Nations Convention on the Law of the Sea, ou UNCLOS). Cette véritable Constitution des océans fait de la haute mer une zone de libertés – de navigation, de survol aérien, d’installation de câbles et pipelines, de construction d’îles artificielles et autres installations autorisées par les lois internationales, de pêche et de recherche scientifique -, laissant malheureusement le champ libre aux dérives propres aux zones de non droit.
Certes réduites au fil du temps, ces libertés ne sont pas compatibles avec la nécessité de protéger les océans comme l’exigent l’effondrement de la biodiversité et la lutte contre le changement climatique.
La pêche pas directement ciblée mais concernée par les AMP
Décidées en 2015 et entamées en 2017, les négociations qui reprennent ce 7 mars portent sur les quatre piliers du projet de traité : les ressources génétiques marines (RGM), y compris les questions relatives au partage des avantages liés à leur exploitation entre pays développés et pays en développement ; les mesures telles que les outils de gestion par zone (OGZ), notamment les aires marines protégées (AMP) auxquelles le projet de traité est trop souvent réduit ; les études d’impact environnemental (EIE) ; et le renforcement des capacités ainsi que le transfert de la technologie marine entre pays du Nord et du Sud.
« En tant que telle, la pêche ne figure pas au programme, souligne Julien Rochette de l’IDDRI. Mais elle sera évidemment concernée par la création d’aires marines protégées, au même titre que la recherche industrielle par exemple. A l’inverse des quelques zones aujourd’hui protégées de certaines activités, celles visées par le traité seront multidimensionnelles, et correspondront une approche plus holistique concernant l’ensemble des activités humaines. » D’où l’opposition de certains Etats pêcheurs (Islande, Corée du Sud, Russie) ou très allants sur le plan de la recherche industriel comme le Japon.
Process de surveillance, financement et gouvernance à préciser
Parmi les sujets clés à préciser, figure notamment la manière dont seront identifiées, créées et surveillées ces aires marines protégées. Seront-elles choisies uniquement pour la fragilité des écosystèmes qu’elles abritent ? Ou également pour leur capacité à capter du CO2 et donc leur rôle, globalement déjà mis à mal, dans la régulation du climat ? Quelles informations les Etats devront-ils fournir les concernant ? Qui pour les surveiller et sanctionner les infractions ? Le process de Suivi /Contrôle/ Surveillance (Monitoring, control, surveillance ou MCS) reste totalement à élaborer.
Autre point non tranché, celui du financement. Devra-t-il être mutualisé entre tous les pays -membres de l’ONU, ou laissé plus particulièrement à la charge des Etats côtiers ?
Plus globalement, le dispositif institutionnel et la gouvernance du traité restent à définir : désignation d’un comité scientifique et technique, mandat de la future Conférence des Parties (COP) à laquelle il reviendra de préciser les modalités d’application des principes généraux contenus dans le traité.
Protéger 30% des océans
Même pour cela, les experts s’accordent à penser qu’une seule session ne suffira pas, et qu’une autre sera certainement nécessaire. De nombreuses voix s’élèvent pour qu’elle se tienne également en 2022, ne serait-ce que pour contribuer à l’objectif défini par la COP15 sur la biodiversité et réaffirmé il y a quelques jours par le secrétaire général des Nations unies dans la foulée de la dernière publication du GIEC : protéger 30% d’ici 2030 la biodiversité de 30% de la planète. La répartition entre les territoires terrestres et marins n’a pas été précisée, mais Emmanuel Macron s’est réjoui lors du One Ocean Summit que la coalition de Haute Ambition pour la Nature et les Peuples, lancée lors du One Planet Summit de janvier 2021 avec 30 pays visant l’objectif de protéger 30 % des terres et océans d’ici 2030, en comptait désormais plus de 80.
POINTS DE REPÈRE
Illustration de « Une » publiée à l’occasion de la publication dans l’Humanité le 24 mars 2016 d’un article sur la haute mer : « un premier cadre de négociations consacrées à l’établissement d’un droit international en faveur de la haute mer. Il ne s’agit pas encore du grand soir pour la protection du grand large ».
09/11/2021 – Un éclairage de Séverine Michalak, juriste avait été publié sur les enjeux du futur traité international sur la haute mer : Entre régionalisme et globalisme, un compromis nécessaire à la hauteur des enjeux de conservation de la biodiversité et du climat… Actuellement, le seul instrument juridique qui couvre la haute mer est la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS) signée à Montego Bay en 1982.
12/02/2022 – One Ocean Summit : Discours d’Emmanuel Macron ICI
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