Europe France – 24/06/2022 – energiesdelamer.eu. Partie 1 – GROOM RI, est un projet d’infrastructure de recherche européenne qui exploite les atouts des systèmes autonomes marins pour fournir des données de haute qualité et des services pour observation de l’océan. Interview de Laurent Mortier

Les océans sont aujourd’hui surveillés par une constellation de satellites et de nombreuses bouées de surface. Mais leurs observations ne pénètrent que de quelques mètres tout au plus la colonne d’eau. Le constat est bien connu : l’océan demeure aujourd’hui plus mystérieux pour l’homme que l’espace. Mais cette situation, d’autant plus regrettable étant donné le rôle majeur qu’il joue dans la régulation du climat, tout en subissant de plein fouet les effets du réchauffement, est en train d’évoluer.

Une flotte mondiale de 4000 robots  flotteurs profileurs

Sans remonter jusqu’à Jules Verne, les robots explorateurs des mers ne datent pas d’hier. Depuis la dernière décennie, on compte ainsi dans les eaux du monde entier quelques 4000 robots très simples, les « flotteurs profileurs Argo », qui dérivent avec les courants et qui ont déjà révolutionné l’observation de la température et de la salinité de l’océan en profondeur.

Mais de l’eau a coulé dans les mers depuis que la revue Oceanography publiait, en avril 1989, la vision du célèbre océanographe Henry Stommel, qui rêvait d’un monde où des véhicules autonomes sous-marins capables de se déplacer surveilleraient les océans. « The Slocum Mission » décrivait des planneurs sous-marins autonomes, pilotables à distance, ou « gliders », récoltant des données à une échelle et à une fréquence sans précédent.

Inspirés par Stommel, des scientifiques et ingénieurs européens ont commencé à développer depuis une infrastructure européenne de recherche marine pour coordonner et intégrer leur activité à l’ensemble des gliders et des systèmes autonomes marins similaires capables d’observer à longue distance et sur de très longues périodes.

Des données précieuses pour les énergies marines et le transport maritime

A l’image des « gliders » de GROOM RI (Gliders for Research, Ocean Observations and Management Research Infrastructure), ces robots transmettent en temps réel des données (température, salinité, concentration en nitrate, propriétés optiques, mesures du bruit sous-marins, images du zooplancton, etc.) avec une grande résolution spatiale et temporelle.

« Leur intérêt réside dans leur large spectre d’observation, qui s’étend de la surface jusqu’à 1000 mètres de profondeur, voire bientôt 6000 m », souligne Laurent Mortier professeur d’océanographie à ENSTA-Paris et membre du Laboratoire d’Océanographie et du Climat de Sorbonne Université, où il coordonne le projet de GROOM RI. Ce projet européen vise à concevoir, proposer un modèle financier puis mettre en service une infrastructure de recherche de pointe  pour exploiter au mieux ces robots marins par centaines, en offrir l’accès et proposer des services et toute l’expertise nécessaire pour l’innovation en robotique marine.

A l’instar d’EumetSat, une agence qui exploite les satellites dans le programme européen Copernicus, on compte aujourd’hui une vingtaine de ces infrastructures de recherche pour l’observation de la terre et des océans. Toutes poursuivent un même objectif : permettre à la société civile, aux chercheurs et aux entreprises un accès aux données facile et à moindre coût, aussi bien dans un cadre de recherche académique, que pour nourrir les systèmes d’observation, ou pour des raisons réglementaires – telles que la surveillance de la qualité de l’eau – et de plus en plus pour répondre aux besoins des acteurs de l’industrie. Celles récoltées par les gliders pourront notamment être exploitées par les acteurs de l’économie bleue, de l’aquaculture, des énergies marines, aussi bien que par les scientifiques qui étudient déjà avec ces données la pollution ou l’évolution du climat et ses impacts. « Les industriels de l’exploration des grands fonds marins voire les compagnies de transport maritime elles-mêmes devront dans les prochaines années être capables de mesurer leur impact et auront besoin de ces données », ajoute Laurent Mortier.

Des efforts d’observation encore lacunaires

A l’inverse de certains gros robots sous-marins très onéreux, nécessitant d’être mis à l’eau depuis des bateaux et affichant quelques dizaines heures d’autonomie au plus, ces gliders, qui bénéficient de la miniaturisation des capteurs, peuvent demeurer à l’eau plusieurs mois, l’objectif étant de parvenir rapidement à une autonomie d’un an. Ils pèsent moins de cent kilos et coûtent moins de deux cents mille euros. Un coût à l’achat auquel il faut ajouter les coûts d’exploitation pour lesquels les économies d’échelles permises par GROOM RI pourront être très importantes.

Ils pourront utilement compléter les observations menées pour la recherche académique par les navires des organismes de recherche, en bien plus petit nombre, et qui eux, coûtent très cher et sont de surcroît polluants.

Depuis une quinzaines d’années, des efforts de recherche avec des gliders ont été menés, notamment en Méditerranée française et espagnole, au large de Chypre, dans les mers nordiques ou dans les eaux tropicales. Le Royaume-Uni, est particulièrement ambitieux en matière de gliders et autres véhicules autonomes puisqu’il souhaite atteindre la neutralité carbone de sa flotte de recherche grâce à ces robots en grand nombre complétant quelques navires de recherche. « Mais à ce jour l’observation n’est pas systématique et des zones entières restent inobservées faute d’une approche vraiment coordonnée entre les acteurs de l’observation », souligne Laurent Mortier.

Des ateliers pour mieux cerner les besoins et développer les partenariats

GROOM RI continue de rassembler, en Europe, les opérateurs de robots marins, des ingénieurs, des scientifiques, des fabricants de capteurs et de plateformes,  des organisations de la société civile (dont les ONG environnementales) et les gestionnaires de données, tous ayant vocation à partager leurs résultats, leur expérience et leurs connaissances sur l’océan. GROOM RI s’appuiera sur un ensemble distribué de « gliderports », de centres de données et de contrôle, d’installations d’étalonnage, et sur un hub central qui coordonne toutes les fonctionnalités et permet l’accès  et le soutien aux utilisateurs. La prise en charge des tests, du développement de systèmes et de la formation en robotique marine y est également incluse.

Pour ses ressources, le consortium s’appuiera sur des financements institutionnels régionaux, nationaux et européens, et possiblement sur des financements du secteur privé. La viabilité financière de l’infrastructure reposera notamment sur l’adéquation des services proposés aux besoins de parties prenantes qui sont évalués par le biais d’ateliers et de nombreuses enquêtes. En particulier pour les acteurs industriels qui bénéficie déjà d’un groupe consultatif dédié.

voir le site de GROOM RI

Espace Sea-Research stand A23 à euromaritime

GROOM RI participe à l’espace « Sea-Research » organisé par MerVeille Energie et energiesdelamer.eu, avec le soutien du Gigan et de la Sogena. à Marseille du 28 au 30 juin. Laurent Mortier interviendra dans l’atelier du programme européen WestMed le mardi 28 juin qui se tient de 14h30 à 17h30 qui est organisé par le Hub France coordonné par Frédéric Herpers Stratégie Mer et Littoral et Colin Ruel Pôle Mer Méditerranée

Le glider est présenté par Laurent Mortier et Kamil Szafranski, directeur du projet que coordonne pour l’Europe Laurent Mortier, Yves Ponçon, directeur technique, sur l’espace Sea-Research lors d’euromaritime à Marseille Stand A23.

 

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