SAINTE ROSE – (Ile de La Réunion – France – U.E.) – 19/01/2010 – 3B Conseils – Profitant de la visite éclair du Président de la République française dans les départements français de l’Océan Indien, le journal réunionnais Clicanoo, consacre (ICI) un très intéressant article à l’engagement d’une start-up de l’île dans le domaine des biocarburants algaux. Cette start-up, la société BIOALGOSTRAL, déjà loin d’être une inconnue, s’est spécialisée dans la mise au point d’un biocarburant algal à base de micro algues pei. Cette jeune société française a fièrement affiché sa technologie au salon Pollutec de décembre dernier après avoir déjà présenté en juillet 2009 au Premier ministre (cf. photo) un échantillon d’une souche de micro algue lipidique permettant la production d’un algo carburant et actuellement développé par l’entreprise.
Il s’agissait en fait du premier des quatre millilitres produits expérimentalement ! Mais BIOALGOSTRAL fonctionnant pour l’instant sur ses fonds propres (€100.000) compte fermement développer plusieurs centaines de litres en 2010 en sollicitant l’aide de l’ADEME, de ARVAM et de l’Arer. En décembre dernier la mairie de Sainte-Rose recevait des mains du Président de l’Assemblée Nationale, M. Bernard Accoyer, un prix récompensant le projet développé par BIOALGOSTRAL de couplage d’une unité de production micro algue à une station d’épuration d’eaux usées en vue de produire un bio carburant. La construction de ce prototype à Sainte-Rose devrait représenter entre €1 et 2 millions d’investissement. Cette commune de la Réunion s’est en effet engagée de longue date dans une démarche globale de développement durable et souhaite valoriser les effluents issus de sa future station d’épuration (STEP). Dans ce but, la technologie mise en œuvre par BIOALGOSTRAL permet de capter et recycler les nitrates et les phosphates dans les eaux usées urbaines et de fixer le CO2 obtenu par la méthanisation des boues en les transformant en ressource.. La captation des nutriments nécessaires à la production de micro algues permettra notamment la valorisation en biocarburant de la biomasse algale. La mise à disposition pour BIOALGOSTRAL du terrain destiné à commencer le process industriel a été votée en décembre dernier par la municipalité de Sainte-Rose. Comme le fait remarquer le journal Cliclanoo dans son article, cette technologie présente bon nombre d’avantages vis-à-vis des autres systèmes actuellement en phase de développement ailleurs dans le monde. “ En partenariat avec l’Université de Toulouse et un grand constructeur automobile européen, nous travaillons également à tester notre algo carburant afin d’obtenir rapidement sa normalisation européenne » a confié le Docteur Gabin Treboux, en charge de la recherche et du développement. Selon d’autres sources, le constructeur automobile en question pourrait bien etre Peugeot. Les deux autres membres du trio BIOALGOSTRAL, Laurent Blériot, en charge de la communication, et René Duflot, Président fondateur de BIOALGOSTRAL et spécialiste en gestion des entreprises, ont clairement pour objectif de répondre à terme localement à l’obligation européenne d’incorporer, dès 2010, 5,75% de biocarburant aux carburants “classiques” (7% en France). Un pourcentage déjà appelé à passer à 10% en 2015 (20% en France). “Et pourquoi ne pas répondre en 2030 à l’ensemble des besoins en biodiesel aux côtés de la voiture électrique”, ambitionne le chargé de communication. D’autres universitaires sont appelés à venir renforcer prochainement l’équipe, après l’arrivée d’une biologiste spécialiste en micro-algues, le Dr Zubia, au côté des trois associés, dont le laboratoire est situé dans le bâtiment du cyclotron à la technopole de Saint-Denis de la Réunion. Dans les prochaines semaines, c’est un container de 40 pieds transformé en laboratoire, fabriqué en Angleterre, qui permettra de produire les premiers litres via quatre photobioréacteurs. Un carburant qui sera testé cette année sur des véhicules (Peugeot? ) mis à disposition par le groupe Caillé.
A long terme et en cas de succès, la capacité de production d’algo diesel est estimée au départ à 17 millions de litres par an, chiffre appelé à augmenter chaque année. Mais le succès de la filière est suspendu à deux facteurs déterminants : la législation (entendez la taxation si importante en France dans le cadre des carburants) dans un cadre de forte concurrence avec les Etats-Unis où les biocarburants sont déjà réglementés et, deuxième facteur, le prix auquel sera vendu l’algo diesel. Côté législation : voilà enfin une bonne opportunité pour nos politiques de se livrer à leur legislomania favorite… Pour le reste (la tarification), on navigue pour l’instant dans le flou le plus absolu même si la technologie de fabrication de BIOALGOSTRAL oriente vers des pistes plutôt positives.
En effet l’atout premier de la technologie développée par BIOALGOSTRAL réside dans son indépendance totale vis-à-vis de tout engrais provenant de la terre, par l’absence d’achat de phosphate (une matière non renouvelable). “Alors que jusqu’à 40% du coût de fabrication du biodiesel sont liés à l’achat des matières premières, nous allons, nous, utiliser les ressources inutilisées se trouvant dans les eaux usées. Je rappelle que l’homme produit en moyenne deux grammes de phosphore par jour via ses excréments”, assène Laurent Blériot en rappelant que les algues se développent encore plus vite dans l’eau de mer polluée. « Les excréments sont une ressource nutritionnelle pour l’algue au même titre que peuvent l’être les lipides chez l’homme ». Certaines sociétés américaines, dont j’ai pu déjà parler dans ce blog, se sont aussi intéressées à ce mode de couplage production algale/épuration d’eaux usées.
Par ailleurs Clicanoo révèle aussi, au travers d’un entretien avec Philippe Bodilis, le directeur général de Total à la Réunion, que les pétroliers seraient prêts à jouer le jeu… Ce qui n’est pas la moitié d’un scoop ! « Nous pouvons être prêts du jour au lendemain”, a déclaré le DG de Total en précisant toutefois ne pas se situer en tant que producteur, “mais en tant que distributeur de carburant. Le produit peut être incorporé localement aux carburants une fois sa faisabilité prouvée comme cela a été le cas pour l’éthanol”.
Enfin il semblerait, d’après des indiscrétions, que le puissant groupe chinois Beijing Urban Construction Group (BUCG), jamais insensible aux innovations technologiques venues d’ailleurs, ait souhaité investir dans deux autres starts-up réunionnaises, Toyo Energy Environment et Toyo Bio Composits Environnement, spécialisées aussi dans le recyclage des déchets à la fois en gasoil et en menuiseries composites. Le montant de l’investissement se monterait à € 38 millions sur 5 ans, transfert de technologie compris. Un accord aurait même été signé qui ferait de Beijing Urban Construction Group (BUCG) l’actionnaire à 35 % des deux starts-up pour la production de biocarburant.
En voilà qui ont déjà résolu la question de la rentabilité de l’investissement !
Article : Francis ROUSSEAU
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