MADRID – (Espagne – U.E.) – 25/03/2010- 3B Conseils – Plusieurs lecteurs du blog ont attiré mon attention cette semaine sur une information circulant sur le web à propos d’une « nouvelle technologie » d’énergie marine. Ce qui interpellait les lecteurs qui m’ont contacté ce n’est pas tant la nouveauté de ce système que l’explication de sa façon de fonctionner qui visiblement en a laissé perplexes plus d’un. Sur la nouveauté technologique d’abord, je dirai que la vitalité du secteur des énergies de la mer est telle en ce moment que de nombreuses universités et entreprises tentent de se réunir en consortium pour proposer chacune leur solution innovante. Ce foisonnement, même s’il est très lié à un phénomène de mode en faveur des énergies marines qui connaîtra le destin de tous les phénomènes de mode, est plutôt bénéfique. A condition toutefois de ne pas perdre de vue qu’à l’heure des choix il y aura peu d’élus.
Je suis donc allé sur le site de la société espagnole qui propose cette « nouvelle technologie » présentée comme capable de récupérer à la fois l’énergie des vagues et celle des courants marins pour produire de l’électricité. La compagnie espagnole qui la teste répond au doux nom de PIPO Systemas SL. Passé le premier sourire, elle paraît pourtant tout ce qu’il y a de sérieux. Fiche d’identité de la société fondée en 2002 et du projet ICI. Le projet est concrétisé par un démonstrateur nommé WELCOME (Wave Energy Lift Converter Multiples España) basé sur la technologie APC-PISYS. On trouvera une vidéo de démonstration (5 minutes) un peu laborieuse mais très techniquement détaillée du système APC-PISYS sur You Tube ICI. Ce système est estampillé par le Ministère de la Science et de l’Innovation espagnol dont il a reçu une subvention de 2,1 millions d’euros et a reçu l’aval du Plan E, plan gouvernemental destiné à stimuler l’économie et l’emploi. Un prototype de 100-150 kW à l’échelle 1:5 (montré dans la vidéo de démo) est en cours de finalisation et devrait être déployé prochainement au large des îles Canaries pour ses premiers tests en environnement marin réel.
Pour répondre à la question posée par les lecteurs, de quoi s’agit-il donc au juste ? A première vue c’est une technologie qui pourrait rappeler celle des colonnes d’eau oscillantes utilisées dans les turbines de Wells, PDF description de la technologie des colonnes d’eau oscillantes ICI. Mais même s’il y a vaguement quelques points communs entre les deux technologies, notamment dans le fait d’utiliser des éléments de structures submergées pour tirer de l’énergie à la fois des mouvements de l’air et de l’eau, la comparaison s’arrête là et la technologie APC-PISYS en diffère toutefois totalement.
La technologie APC-PISYS fait appel à quatre composants distincts. Premier composant un jeu de bouées métalliques positionnées en surface (en jaune-marron sur le schéma) destinées à tirer de l’énergie du mouvement des vagues à la surface des flots. Deuxième composant : un jeu de bouées métalliques submergées dont la position sous l’eau varie en fonction du volume (en rouge sur le schéma) et qui sont destinées à tirer de l’énergie des mouvements exercés par les courants marins. Troisième composant : une troisième bouée métallique positionnée à une profondeur invariable qui joue le rôle de transmission mécanique du système. Un quatrième composant : une bouée fixée au fond marin et un système assez complexe de vérins hydrauliques (non visibles sur l’illustration ci-contre mais sur les autres) qui semblent non seulement relier entre elles les bouées mais surtout les actionner les unes par rapport aux autres. C’est ce qui fait dire aux promoteurs du projet que ce système exploite à la fois le potentiel cinétique des vagues et celui des courants marins. Bien entendu tout ceci est théorique et demande à être testé en grandeur réelle et en condition de mer extrême, les océans du monde n’étant pas aussi sages, est-il besoin de le rappeler, que les simulations en bassin le laisse paraître. Ce qui me chagrine dans ce système très ambitieux c’est la complexité des structures métalliques et des vérins difficilement compatible avec les impératifs de maintenance et les contraintes de corrosion du milieu marin.
Les premiers prototypes industriels qui devraient être installés en Galice (Espagne) à une date non communiquée devraient se présenter sous forme de plusieurs unités de 8 ou 16 groupes de bouées. Ensemble, ces unités pourraient atteindre une capacité de 10 à 20 MW, selon PIPO. Ce qu’il faut surtout retenir de cette proposition est le fait qu’avec le prototype Welcome, l’Espagne tente de faire officiellement son entrée dans la cour des équipementiers et fabricants de technologies renouvelables marines, dont elle s’était jusque-là tenue un peu à l’écart.
Article : Francis ROUSSEAU
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