Russie Ukraine Europe – 22/02/2022 – energiesdelamer.eu. Le projet phare pour Berlin et Moscou, le gazoduc Nord Stream II, a été suspendu suite à la reconnaissance, lundi 21 février, par Vladimir Poutine de provinces ukrainiennes pro-russes. L’Ukraine est présidée par Volodymyr Zelensky depuis le 20 mai 2019.
En Europe et aux Etats-Unis, les premières sanctions sont tombées le mardi 22 février contre la Russie, après la décision de Vladimir Poutine de reconnaître, l’indépendance des deux « républiques » séparatistes prorusses du Donbass, Donetsk et Lougansk. Une décision unanimement condamnée, des Etats-Unis à l’Union européenne en passant par la Turquie. En réaction, les menaces de sanctions, proférées depuis le récent regain de tension entre Kiev et Moscou, prennent forme.
Nord Stream II
L’énorme projet qui était largement critiqué, vient de recevoir par le chancelier allemand, Olaf Scholz son coup d’arrêt avec la suspension de la certification du gazoduc, indispensable à « sa mise en service ». Le projet va faire l’objet d’une « réévaluation » politique par le ministère de l’Economie en raison de la « situation géopolitique » nouvelle.
Le gazoduc, dont la construction est achevée depuis l’automne dernier, n’était pas en service en raison d’un blocage juridique de la part du régulateur énergétique allemand: il ne respecte pas encore la législation européenne et allemande du secteur. En effet, pour se conformer aux règles européennes, Nord Stream 2 AG a créé l’entreprise G4E (“Gas for Europe”) a établi a son siège social à Schwerin Mecklenburg-Vorpommern en Allemagne. Elle est dirigée par Reinhard Ontyd Gas for Europe est une filiale de Nord Stream 2 basé à Zug en Suisse. En attendant l’éventuelle reprise de la procédure par l’agence fédérale, Gazprom assure continuer de remplir le pipeline du gazoduc, malgré la crise diplomatique entre la Russie et les Européens.
La procédure de certification de Nord Stream 2 AG en tant qu’opérateur de transport indépendant.
En novembre 2021, la Bundesnetzagentur (Agence fédérale allemande des réseaux) a déclaré qu’une filiale devrait être créée comme condition préalable à l’avancement de la procédure de certification d’un opérateur de transport indépendant. La Bundesnetzagentur a ainsi suspendu le 16 novembre 2021, la procédure de certification de Nord Stream 2 AG en tant qu’opérateur de transport indépendant. Cette décision était intervenue, après un examen approfondi de la documentation, la Bundesnetzagentur a conclu qu’il ne serait possible de certifier un opérateur du gazoduc Nord 2 que si cet opérateur était organisé sous une forme juridique de droit allemand.
Mais, la décision annoncée mardi va plus loin. Le gouvernement allemand a retiré un avis « politique » favorable qu’il avait émis jusqu’ici concernant le gazoduc et concluant à l’absence de risque de « sécurité » nationale représenté par le projet. Ce point va être réexaminé.
Nord Stream 2 relie la Russie à l’Allemagne via un tube de 1 230 kms sous la mer Baltique d’une capacité de 55 milliards de m³ de gaz par an, sur le même parcours que son jumeau Nord Stream 1, opérationnel depuis 2012. Contournant l’Ukraine, le tracé est censé augmenter les possibilités de livraison de gaz russe à l’Europe à un moment où la production au sein de l’Union européenne diminue.
Une augmentation du prix de l’énergie à prévoir mais qui serait en partie compensée par les exportations des Etats-Unis.
L’annonce allemande a suscité une réaction de l’ancien président de la fédération de la Russie Dmitri Medvedev : « Bienvenue dans un monde nouveau, où les Européens vont bientôt payer 2 000 euros pour 1 000 m3 de gaz. » L’addition pourrait être colossale pour l’Allemagne, qui a importé en 2020 à elle seule 56,3 milliards de m3 de gaz russe, soit 55% de ses besoins en gaz.
Sources : Commission européenne et revue de presse européenne
POINTS DE REPÈRE
Promu par Gazprom, le projet, estimé à plus de 10 milliards d’euros. Nord Stream 2 représente 1 230 kilomètres de pipeline sous la mer Baltique, dont 54 kilomètres dans les eaux territoriales allemandes et l’installation d’atterrissage à Lubmin, dans l’État fédéral allemand de Mecklenburg-Vorpommern. Le pipeline relie le village de Bolchoï Kouziomkino, dans la région de Saint-Pétersbourg en Russie, à Lumbin, une ville côtière au nord de l’Allemagne. L’objectif du projet est de compléter les services du gazoduc Nord Stream 1, déjà en service depuis 2012 et qui suit quasiment le même tracé.
Le nouveau pipeline double ainsi les capacités de transport de gaz depuis la Russie via la Baltique, ce qui permettrait d’atteindre pour ce réseau un approvisionnement de 110 milliards de mètres cube par an vers l’Allemagne. A titre de comparaison, l’UE a importé plus de 440 milliards de mètres cube de gaz naturel en 2019 (contre 385 milliards en 2010), dont 166 milliards provenaient de l’ensemble des gazoducs russes.
Nord Stream 2 : un cofinancement de cinq groupes européens du secteur de l’énergie
L’Allemagne est au sein de l’UE le principal promoteur du gazoduc, qui, selon elle, doit l’aider à accomplir la transition énergétique dans laquelle elle s’est engagée.
Nord Stream 2 comprend cinq entreprises européennes dont une française : OMV, Engie, Wintershall Dea, Uniper et Shell. Basée en Suisse et détenue par Gazprom, la société Nord Stream 2 AG a été créée pour mener à bien le projet, de sa planification à son exploitation en passant par la construction.
Thierry Garcin, auteur de « La fragmentation du monde. La puissance dans les relations internationales », éd. Economica – 2018. Commentaires de Thibault Lavernhe, dans Revue Défense Nationale 2019/1 (N° 816), pages 128 à 129. Thierry Garcin est l’invité le 10 mars 2022 du WTC Rennes Bretagne. Pour s’inscrire ICI
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