Le tarif éolien français sera vraisemblablement annulé pour n’avoir pas été notifié par les autorités avant son entrée en vigueur. La filière demande la publication d’urgence d’un nouvel arrêté pour éviter une paralysie du secteur alors que depuis le 14 octobre dernier, l’Administration française a engagé une démarche de notification d’un nouvel arrêté tarifaire auprès de la commission européenne.
L’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne avait conclu le 10 juillet dernier que le tarif d’achat de l’électricité éolienne par EDF devait être considéré comme « aide déguisée de l’État ».
La plainte déposée par plusieurs associations a fait son effet. La décision de la cour de Justice n’est pas réellement une surprise puisqu’elle est conforme aux conclusions rendues par son avocat général.
Réactions de FEE
. La décision va être suivie par une annulation de l’arrêté tarifaire de 2008 par le Conseil d’Etat, d’ici « deux ou trois mois », selon Frédéric Lanoë, président de France Energie Eolienne. « le gouvernement doit prendre un nouvel arrêté, et cette fois notifié correctement. Faute de quoi, on ne pourra plus signer de contrats dans l’éolien ».
Réactions du SER
. Le syndicat rappelle que si l’annulation de l’arrêté tarifaire éolien avec un caractère rétroactif, était confirmée, elle générerait de très graves conséquences économiques pour la filière. Lire le communiqué de presse
(ICI)
L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 décembre 2013
A la lecture de cet arrêt, Arnaud Gossement* estime qu’il y a deux points à analyser.
En premier lieu, sur le point de savoir si le dispositif français de l’obligation d’achat doit être regardé comme une intervention de l’Etat ou au moyen de ressources d’Etat, l’arrêt précise
« Partant, l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens qu’un mécanisme de compensation intégrale des surcoûts imposés à des entreprises en raison d’une obligation d’achat de l’électricité d’origine éolienne à un prix supérieur à celui du marché dont le financement est supporté par tous les consommateurs finals de l’électricité sur le territoire national, tel que celui résultant de la loi n° 2000-108, constitue une intervention au moyen de ressources d’État. »
Ainsi, à la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat du 15 mai 2012 et de la Cour de justice du 19 décembre 2013, tous les critères sont réunis pour conclure que le dispositif français de l’obligation d’achat d’électricité éolienne relève du régime juridique de l’aide d’Etat.
En deuxième lieu, s’agissant de la limitation des effets dans le temps de l’arrêt de la CJUE, l’arrêt rendu ce 19 décembre 2013 précise :
«
Dans ces conditions, il n’existe dans la présente affaire aucun élément de nature à justifier une dérogation au principe selon lequel les effets d’un arrêt d’interprétation remontent à la date de l’entrée en vigueur de la règle interprétée (voir arrêt du 13 février 1996, Bautiaa et Société française maritime, C-197/94 et C-252/94, Rec. p. I-505, point 49 et jurisprudence citée).
44 Partant, il n’y a pas lieu de limiter dans le temps les effets du présent arrêt« ……
Toujours d’après Arnaud Gossement, si le Conseil d’Etat annule rétroactivement les arrêtés de 2008, il n’est pas tout à fait exact de dire qu’il n’y aurait plus du tout d’arrêté tarifaire. L’arrêté de 2008 avait été pris à la suite de l’annulation de celui de 2006.
Reste que l’arrêté tarifaire du 8 juin 2001 n’a pas été annulé. Certes, il a été abrogé par l’arrêté du 17 novembre 2008 (article 8). Mais cette abrogation a été elle-même annulée. L’arrêté du 8 juin 2001 serait donc appelé à produire de nouveau des effets de droit si l’arrêté du 17 novembre devait être rétroactivement annulé.
Et il n’est pas certain que cet arrêté du 8 juin 2001 puisse être qualifié de la même manière que celui de 2008 au regard du droit européen des aides d’Etat. La principale difficulté serait davantage d’ordre matériel, le mécanisme de compensation ayant été modifié depuis.
En conclusion, l’urgence est que le Gouvernement puisse trés rapidement rassurer la filière en présentant un calendrier de nature à permettre une visibilité la moins mauvaise possible sur les conditions de soutien au développement de l’énergie éolienne pour les mois à venir.
Article rédigé à partir des communiqués de presse de FEE, du SER et de l’analyse de Maître Gossement Avocat (
décryptage)