France – Brest – Mardi 04/07/2017 – Depuis le 27/06/2017, la thèse de Séverine Michalak est disponible sur le site HAL. Cette thèse soutenue le 4/03/2016 à l’IUEM-UBO / AMURE, consiste à démontrer les spécificités juridiques des énergies marines renouvelables à travers les interactions entre le marché des EMR et le milieu marin.
« Davantage encore que sur les autres marchés de production d’électricité renouvelable, le rôle prépondérant et omniprésent de l’Etat constitue une spécificité du marché de la production d’électricité en mer. Ces aides d’Etat, qui se traduisent principalement par le mécanisme de soutien apportés aux producteurs, entravent la libre circulation de la marchandise électricité provenant des parcs EMR au sein du marché intérieur, bien que justifiées. Des projets d’interconnexions marines entre parcs éoliens offshore, localisés dans différents Etats européens, sont encouragés par l’Union européenne et tentent de contourner les obstacles liés aux régimes de soutien nationaux. Le milieu marin constitue ainsi un vecteur privilégié pour la circulation de la marchandise électricité produite en mer ».
La Thèse
Concrétisée par l’émergence d’un bien valorisable, le bien électricité, à partir d’une chose commune hors-marché (l’océan), les EMR participent dans une certaine mesure à la valorisation économique du milieu marin. Celui-ci prend sa source dans le régime d’implantation des installations EMR, grâce à la perception de redevances d’occupation du DPM notamment, mais elle pourrait aussi provenir du statut de la ressource EMR, si elle était qualifiée de ressource naturelle valorisable.
La valorisation économique du milieu marin s’inscrit toutefois dans une démarche planificatrice stratégique, dont le succès dépend de la conciliation de l’exclusivité dans l’usage avec le régime juridique du milieu marin. Les outils de planification des activités en mer pourraient à terme intégrer davantage en amont les règles de résolution des conflits d’usage potentiels, les règles de sécurité en mer ainsi que les régimes de responsabilités en cas de dommages liés à une collision. Des outils spécifiques à la gestion de la sécurité dans les parcs éoliens en mer, vis-à-vis des autres activités telles que la pêche notamment, pourraient être créés, tels le Plan d’intervention maritime (PIM). Des Ocean Trusts, créés au niveau national et international, dont les fonds seraient alimentés par les revenus tirés de la mise en valeur des ressources EMR, pourraient être utilisés pour l’approfondissement des études des écosystèmes marins, dans le cadre de l’application du principe de précaution, les études d’impact environnementales et la résolution des conflits entre usagers de la mer.
La mise en valeur des EMR, à la manière de la Fée Electricité, contribue aussi à la valorisation éthique du milieu marin, en améliorant le bien-être collectif. Elle invite le citoyen, à travers la procédure de débat public, à s’exprimer, bien que la portée de cette procédure soit sujette à critiques. Les débats publics relatifs aux EMR pourraient en effet être un vecteur d’expression plus prégnant pour le citoyen sur les grandes questions énergétiques. A l’échelle de l’usager du milieu marin, la valorisation éthique pourrait davantage se concrétiser à travers les notions de patrimoine commun, voire de public trust. L’analyse à propos des biens publics mondiaux a révélé le caractère transfrontière des EMR, appelant l’émergence d’une gouvernance mondiale des océans.
Si la mise en valeur des EMR contribue, dans une certaine mesure, à la valorisation du milieu marin, celui-ci, réciproquement, à travers son régime juridique protéiforme, conditionne l’accès au marché de l’électricité EMR et façonne sa structure, tant au stade de la production d’électricité que de la vente et de la circulation de l’électricité produite en mer.
La carence de l’initiative privée, si elle ne constitue plus le critère déterminant de la régularité de l’intervention publique sur le marché, caractérise nettement le marché de la production d’électricité EMR.
C’est « l’absence d’intérêt économique des opérateurs privés pour une activité jugée (jusqu’à récemment) a priori non rentable qui ouvre un champ d’intervention naturel à l’initiative publique ».
Cette initiative publique se traduit par l’obligation de service public imposée à EDF consistant à acheter l’électricité produite par les exploitants EMR. Ces dispositifs rendent attractive la mise en valeur de la ressource EMR, qui est en théorie très abondante, mais dont les gisements techniquement et économiquement exploitables sont plus rares, nécessitant une régulation de l’accès à ceux-ci.
En outre, contrairement au marché de l’électricité photovoltaïque qui doit son rapide essor à l’octroi d’un tarif d’achat incitatif, les caractéristiques « maritimes » hétéroclites des gisements de ressources EMR induisent une différenciation dans le niveau de rémunération des exploitants de parcs. L’initiative publique se traduit donc aussi par l’orchestration de procédures d’appels d’offres, nettement imprégnées du droit de la commande publique, et ouvrant l’accès au marché de la production d’électricité EMR.
L’accès à ce marché est conditionné par l’octroi de titres d’occupation du milieu marin, dont la délivrance, en principe à la discrétion de l’Etat, peut se voir soumise à l’obligation de mise en concurrence sous la pression du droit de l’Union européenne, le domaine public étant une ressource essentielle, et du droit de la commande publique. L’accès au marché est donc non seulement régulé par l’Etat mais aussi soumis à son contrôle, via diverses autorisations dont la multiplication des procédures invite à la simplification. L’accès au marché se voit en outre entravé par les obstacles inhérents au régime protecteur du milieu marin dans l’accès au financement des parcs EMR.
La production d’électricité en mer constitue une activité économique, une « offre de biens et de services sur un marché », en l’occurrence une offre de biens, d’un bien, l’électricité, vendue sur un marché très spécifique grâce à un contrat de vente non moins spécifique, dénommé d’ailleurs contrat d’achat et non contrat de vente, dont le contenu est principalement dicté par les cahiers des charges des appels d’offres et l’exécution influencée par le régime juridique de l’occupation du milieu marin.
En tant qu’activité économique, la production d’électricité est soumise au droit de la concurrence. Le critère retenu par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne pour qualifier une activité d’économique, en l’absence de réel marché concurrentiel, réside dans « l’exercice d’une activité dans un contexte de marché ». Les exploitants EMR évoluent dans un « contexte de marché », et ce grâce à des mécanismes de marché mis en place par l’Etat, afin de rendre à terme ce marché pleinement concurrentiel. Opérant ainsi sur le marché spécifique de la production d’électricité EMR, ils sont soumis au droit de la concurrence concernant notamment les pratiques anticoncurrentielles.
Dans la mesure où la finalité du marché de la production d’électricité EMR, créé et contrôlé par l’Etat, est de servir l’intérêt général, voire même de remplir une mission ou certaines obligations de service public, certaines distorsions au droit de la concurrence pourraient se voir justifiées, dont l’octroi de droits exclusifs. Ces distorsions peuvent donc provenir des opérateurs, mais aussi de l’Etat lui-même. Toutes les manifestations de la présence de l’Etat, que ce soit par le biais de soutiens extérieurs au marché, en créant l’offre et la demande, d’interventions indirectes sur le marché à travers sa participation au capital des principaux opérateurs, sont scrutées par le droit de l’Union européenne, et notamment par le droit des aides d’Etat. Davantage encore que sur les autres marchés de production d’électricité renouvelable, le rôle prépondérant et omniprésent de l’Etat constitue une spécificité du marché de la production d’électricité en mer.
Ces aides d’Etat, qui se traduisent principalement par le mécanisme de soutien apportés aux producteurs, entravent la libre circulation de la marchandise électricité provenant des parcs EMR au sein du marché intérieur, bien que justifiées. Des projets d’interconnexions marines entre parcs éoliens offshore, localisés dans différents Etats européens, sont encouragés par l’Union européenne et tentent de contourner les obstacles liés aux régimes de soutien nationaux.
Points de repère
© EDITIONS A.PEDONE EAN 978-2-233-00694-3 http://pedone.info/mer/Brest-2013/19-Energie%20marine.pdf
Energies marines renouvelables – Enjeux juridiques et socio-économiques, sous la direction de Gaëlle GUEGUEN-HALLOUET et Harold LEVREL. 2013
04/03/2016 – Soutenance de Thèse en droit de Séverine Michalak
Cette soutenance de thèse intitulée « Marché des EMR et milieu marin, Contribution à l’étude des spécificités du cadre juridique des EMR » se tiendra le jeudi 4 mars 2016 à 9h dans l’amphi A de l’IUEM-Université de Bretagne Occidentale à Brest
You Tube enregistrement à la Maison de la mer à Lorient
Interview Gérard Thouzeau à Seanergy
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