WASHINGTON / BRUXELLES – 06/06/2011 – 3B Conseils – Par Francis Rousseau – Les problèmes de sécurité au travail et des accidents de travail liés aux grands sites industriels font l’objet aux Etats-Unis d’une attention toute particulière depuis quelques années déjà. Une administration dépendant du Department of Labour (DOL) appelée The Occupations Safety and Health Administration (OSHA) leurs est même spécialement dédiée. Récemment, lors de la grande messe de l’AWEA (American Wind Energy Association), Windpower 2011, l’OSHA a fait savoir qu’elle allait s’intéresser à l’industrie éolienne nord-américaine et que, dès 2012, s’appliquerait à l’industrie éolienne onshore et offshore son programme National Emphasis Program qui vise d’une façon générale à « évaluer avec exactitude les accidents et les maladies contractées par les employés dans l’exercice de leur métier ». Les propriétaires, développeurs et opérateurs de parcs éoliens, de même que les fabricants et les entrepreneurs, sont donc prévenus qu’ils devront appliquer ces règlements de sécurité concernant l’emploi de leur personnel. Selon certains experts, l’application de ces règlements pourrait avoir un impact non seulement sur la conception future des éoliennes mais aussi sur l’exploitation et la maintenance des parcs éoliens onshore comme offshore. Le National Emphasis Program, appliqué par l’US Department of Labour (DOL) à de nombreux secteurs de l’industrie, fera donc ainsi son entrée dans le domaine de l’industrie des énergies renouvelables par la grande porte de l’énergie éolienne !

C’est précisément sur ce thème de la sécurité que les deux grands fabricants de turbines GE et Siemens ont choisi de se rencontrer aujourd’hui même à Londres. Avec une puissance estimée de 40 GW d’éolien offshore à installer d’ici 2020 en Europe, si la culture de la sécurité, de la prévention des accidents et de la gestion a été ignorée ou insuffisamment élaborée en amont de la construction d’un parc éolien offshore, le risque est grand de voir un projet éolien dans son ensemble mis en danger. Comme aux Etats-Unis, la question se pose aujourd’hui de savoir si les risques ont été évalués avec précision et avec quelle méthode ? et si des mesures concrètes ont été prises par les principaux développeurs, entrepreneurs et équipementiers de l’industrie éolienne ? Pour de nombreux spécialistes, il ressort que ces problèmes de sécurité au travail apparaissent comme l’une des cinq principales préoccupations des gestionnaires de projets de l’éolien offshore européen.

Les défis posés par les parcs farshore ou les fermes éoliennes offshore multiturbines demandent une adaptation inédite du personnel au moment de la construction et de l’installation. On ne répètera jamais assez que l’environnement maritime est un environnement instable et extrême. Bien qu’il s’agisse généralement de personnels hautement qualifiés et compétents, ayant déjà travaillé dans le domaine de l’éolien terrestre par exemple, on sait que l’on n’installe pas un parc offshore comme un parc à terre (déjà complexe à installer d’ailleurs !). Personne n’a, d’autre part, le recul des 30 années d’expérience que l’on peut trouver, par exemple, dans le domaine de l’industrie pétrolière et gazière offshore où les règles de sécurité ont eu le temps d’être éprouvées.

L’Union Européenne n’est pas restée inactive face à ces questions. Elle s’est préoccupée, dès la fin des années 1990, d’une meilleure protection de la santé et de la sécurité au travail. Elle a déjà agi dans ce domaine et fixé des normes minimales pour améliorer la sécurité et la santé des travailleurs. Plusieurs directives ont vu le jour qui ont réussi à renforcer les dispositions proposées, au bénéfice des travailleurs. Mais, de l’aveu général, même si les accidents du travail ont diminué de près de 10 % entre 1994 et 1998, les chiffres restent élevés : tous secteurs professionnels confondus, près de 5.500 morts par année et 4,8 millions d’accidents ayant entraîné une incapacité supérieure à trois jours. Plusieurs directives nouvelles renforcent la législation communautaire déjà en vigueur. Dans une résolution votée en octobre 2002, le Parlement Européen a approuvé l’idée d’une stratégie communautaire d’ensemble pour s’adapter aux changements du travail et de la société et a fait valoir ses priorités. Les députés ont notamment demandé de nouvelles propositions législatives sur l’ergonomie des postes de travail, sur la manutention, sur les risques chimiques et biologiques. Les députés ont demandé également que des efforts soient faits pour transposer et appliquer l’acquis communautaire dans les pays adhérents où la situation dans le domaine de la sécurité et de la santé des travailleurs n’est pas satisfaisante. La résolution fixe des normes minimales, les Etats membres restant libres d’imposer des mesures plus strictes. Ces normes minimales ne sont pas forcément adaptées au domaine spécifique de la construction de parcs éoliens offshore. C’est pourquoi chaque pays, chaque industriel même réfléchit au sujet.

Concernant l’éolien offshore et ses risques spécifiques il faut citer, entre autres, le risque de chutes. L’Union Européenne a répertorié que près de 10 % du total des accidents de travail sont imputables à des chutes. Pour l’Union Européenne, on estime à près de 500.000 le nombre annuel de chutes sur le lieu de travail, dues à des lacunes dans l’utilisation des échafaudages ou des échelles. Il en résulte chaque année quelque 40.000 blessures graves et 1.000 décès. C’est la raison pour laquelle le Parlement a approuvé en 2001 une directive sur les équipements qui spécifie la manière dont ils peuvent être utilisés par les travailleurs dans les conditions les plus sûres. Cette directive du Parlement Européen qui renforce l’évaluation des risques, la formation des travailleurs et le niveau de sécurité de certains équipements a été transposée en droit national en juillet 2004. Elle s’applique donc théoriquement sur tous les sites éoliens européens construits ou en construction depuis lors.

Autre risque spécifique aux parcs éoliens offshore : les vibrations. L’U.E. a relevé que 24% des travailleurs dans l’Union étaient soumis à des vibrations. Dans les entreprises d’extraction, dans le secteur de la construction, des transports ou de l’agriculture, les vibrations mécaniques des outils ou engins utilisés peuvent provoquer des lésions articulaires, des troubles neurologiques ou des traumatismes de la colonne vertébrale. La directive adoptée en 2002 a été transposée dans les législations nationales en juillet 2005. Elle fixe des valeurs limites pour les vibrations transmises aux mains, aux bras ainsi que celles transmises à l’ensemble du corps. Le Parlement Européen a pu réduire les seuils autorisés et a également introduit de nouvelles obligations pour l’information des travailleurs et la surveillance de leur état de santé.

Je ne citerai pas ici tous les risques liés à l’éolien offshore, mais il faut savoir qu’une législation globale existe donc déjà, qui protège les travailleurs de ce secteur industriel, même s’il faut sans doute songer, répétons-le, à l’adapter avec plus de précision aux domaines spécifiques de l’industrie éolienne offshore comme de toutes les nouvelles énergies marines renouvelables en général, symboles d’une nouvelle ère industrielle.

Docs sites et articles de lois liés. Photos : construction du parc éolien offshore de BARD 1 ©BARD 1

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