MARSEILLE – (France – U.E.) – 21/04/2010 – 3B Conseils – Ce post continue le tour de France de la planification des énergies éoliennes en mer commencé voici 3 semaines. Autant le dire tout de suite le » document de planification du développement de l’énergie éolienne en mer de la Préfecture de la Région PACA » mis en ligne en février 2010 ne laisse pas beaucoup d’espoir quand à l’implantation d’énergie éolienne offshore en Méditerranée. Je n’hésiterai même pas à dire ici, après sa lecture, que le porteur de projet qui se risquerait dans ces eaux serait un peu… » fada « , comme on dit dans le coin !
Ce qui est intéressant dans ce document consultable en ligne aux adresses que je donne plus bas et ICI, c’est qu’à aucun moment de sa rédaction il ne laisse une quelconque chance à l’éolien offshore. On a même souvent l’impression (mais ce n’est qu’une impression bien entendu !) que dès qu’il y aurait la moindre chance d’implantation possible, elle est balayée d’un revers d’argument cinglant qui ne souffre aucune discussion. On peut ainsi lire dès le début, des phrases qui mettent bien en condition le lecteur, du genre : » Le littoral méditerranéen, du fait de son attractivité touristique et des activités maritimes intenses qui s’y pratiquent, est fortement générateur de contraintes « . A bon entendeur… bonjour ! Je précise d’emblée pour le lecteur peu averti que lorsque que le législateur parle du » littoral méditerranéen » il veut bien entendu parler, avec cette petite tendance centripète qui le caractérise si bien, de l’unique » littoral méditerranéen français « … Et le législateur de préciser que les critères » favorables » et » défavorables » ont été définis » lors de l’étude ADEME-IFREMER en 2007, mis à jour par les industriels en octobre 2009 et au vu des critères technico-économiques actuels « . Le voilà donc blindé de toutes parts l’État, à ceci près que les critères technico-économiques actuels ne sont pas forcément ceux de demain comme chacun sait.
Je vous laisse déduire.
Deux types de zones de » sensibilité majeure » prédominent sur la majorité des espaces maritimes méditerranéens français auxquelles se surajoutent (eh oui un malheur n’arrive jamais seul!) en de nombreux points du littoral PACA et Languedoc Roussillon des » zones rédhibitoires à toute implantation d’éoliennes à proximité immédiate des côtes « .
Les principales zones de » sensibilité majeure » sont de deux natures :
– les zones bénéficiant d’une protection environnementale
» Le réseau Natura 2000, particulièrement dense sur le littoral méditerranéen, constitue l’essentiel des superficies auxquelles est affectée une sensibilité majeure. La même sensibilité est, par ailleurs, appliquée aux zones Natura 2000 issues de la directive » Oiseaux » qu’à celles issues de la directive » Habitats « . En effet, l’implantation d’un parc éolien est considéré par le législateur comme susceptible d’interférer avec l’avifaune (couloirs migratoires importants) autant qu’avec la qualité des fonds marins (herbiers de posidonies, habitat prioritaire). » Ont également été pris en compte, les différents parcs nationaux et parcs marins existants, ou en cours de création ou d’extension (Parc de la Côte Vermeille, Parc des Calanques, Parc de Port Cros). Ces trois parcs représentent également des superficies significatives de zones de sensibilité majeure.
– les zones grevées de servitudes militaires
» Le littoral méditerranéen dispose d’une série de plusieurs ports de commerce importants répartis sur l’ensemble de la côte : Port Vendres, Port la Nouvelle, Sète, Marseille, Toulon, Nice. La présence du principal port militaire de la Marine nationale (Toulon) implique également un niveau de servitudes spécifique. » Les autres pays européens, le Danemark, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique, et les Pays Bas par exemple, n’ont pas ce genre de ports de commerce importants et de ports militaires, c’est bien connu ! Imaginez-vous que Londres, pour ne citer que cet exemple, est une si minuscule cité portuaire que l’on peut se permettre d’y implanter un parc éolien offshore à ses portes ! A Londres, ce petit village européen c’est possible mais à Marseille ou Nice ces grands ports internationaux que la planète entière nous envie, ce n’est pas possible. Donc acte. Comme si cela ne suffisait pas, en plus des villes et ports que les autres pays n’ont pas, nous avons aussi en proximité immédiate du littoral plusieurs aéroports (Perpignan, Montpellier, Marseille-Marignane, Toulon, Nice) que les autres pays n’ont pas non plus bien entendu. Et puis ,c’est bien connu aussi, en France particulièrement l’implantation d’éoliennes interfère toujours avec les activités aériennes. Cela me rappelle cette histoire qui court beaucoup dans les milieux éoliens et qui concerne un dialogue (réel parait- il) entre un général danois en conversation avec Patrick Ollier le rapporteur français si amical à l’endroit des éoliennes. Le général danois s’adressant un peu étonné à P. Ollier lui dit : » Mais vous savez nous ne rencontrons pas de problèmes entre les éoliennes et les radars au Danemark « . Et Patrick Ollier de lui répondre tel Fernandel dans Ignace : » Nous, oui « .
No comment !
Pour en revenir au contenu du document de la préfecture dont je parle aujourd’hui, il égraine ensuite presque avec plaisir – et en tout cas avec force détails – toutes les contraintes militaires qui rendent impossible l’implantation d’éolienne en Méditerranée… française. Y passent : la chaîne sémaphorique de la Marine nationale avec un niveau de sensibilité élevé. « Les zones de protection des sémaphores impliquent en effet, pour chacun d’entre eux, une zone » rédhibitoire » de 10 km de rayon « . Puis viennent les zones de coordination qui impliquent, quant à elle, une zone de sensibilité » forte » de 30 km de rayon autour de chaque sémaphore ; les célèbres radars portuaires et radars de l’armée de l’Air entraînant leurs propres zones de protection et de coordination. Bref… si bien que mis bout à bout » les effets cumulé de l’ensemble de ces zones de niveau de sensibilité élevé, voire d’exclusion, est donc particulièrement significatif . »
» You don’t say » comme disent les britanniques ou » Tu l’as dit mimi » comme disait Pierre Dac ! Sur le littoral Méditerranéen français donc, la prise en compte croisée de la zone de potentiel technique éolien et des différentes zones de sensibilité ne laisse apparaître aucune zone de sensibilité modérée où l’on pourrait éventuellement implanter un parc. L’essentiel de la zone de potentiel éolien se trouve couvert par des zones rédhibitoires ou par des zones de sensibilité majeure.
Donc exit l’éolien offshore en Méditerranée française ? Pas tout à fait. Le législateur ne veut pas déprimer totalement l’équipementier putatif ou veut peut-être simplement se garantir du ridicule que provoquerait l’installation en mer par ses voisins immédiats espagnols et/ou italiens de parcs éoliens en Méditerranée… internationale. Encore que le ridicule n’ait jamais tué le législateur ! L’examen attentif de la carte de synthèse de la Préfecture (que je ne diffuse pas) permet donc de déterminer une zone vaguement moins défavorable. Elle se situe au large de la limite séparative entre les départements de l’Aude et de l’Hérault. Cette zone, techniquement praticable, se trouve à une distance des côtes comprise entre 5 et 14 km, et représente une superficie de 250 km2. Autant dire un confetti marin !!!! Mais même s’agissant de ce confetti, le document s’empresse de préciser que, » même moins défavorable, cette zone n’est pour autant pas exempte ni d’enjeux (pêche, plaisance, tourisme), ni de contraintes « . Là encore on remarque cette volonté de n’émettre aucun signal positif concernant l’implantation d’éolienne en Méditerranée. Surtout pas le moindre signal positif ! Et au cas où, malgré toutes les précautions prises, il y en transpirerait le moindre, on convoque à nouveau » la servitude hertzienne de la chaîne sémaphorique de la Marine nationale « , qui devra être prise en considération par les porteurs de projets éventuels. Et puis enfin, pour régler définitivement le sort du malheureux confetti,sachez qu’il se se situe dans la zone de coordination du radar Défense de Narbonne. Alors ….. Mais ce ne n’est pas fini, on en rajoute encore une couche et cette fois sur un mode différent, je cite : » La hauteur des aérogénérateurs pourrait ainsi se trouver contrainte au-delà de 200 m. » Comme cette altitude n’est actuellement atteinte par aucune éolienne existante, on ne voit pas tellement la nécessité d’émettre ce genre d’avis dans un tel document si ce n’est pour enfoncer encore un peu plus le coin du négatif dans l’ensemble. En conclusion, il est rappelé encore une fois, à nouveau, et on insiste bien l’index pointé en l’air que : » L’ensemble de ces enjeux sont affectés d’une sensibilité forte, et les éventuels promoteurs ne pourront faire abstraction des contraintes engendrées dans leurs projets. » Et cette phrase qui confine selon moins à la perfection du langage administratif : » Cette zone ne peut donc pas être considérée comme directement propice à l’implantation d’éoliennes en mer posées. En revanche, elle peut être retenue comme la zone la plus propice à l’examen au cas par cas de projets, qui devront répondre à la prise en compte des enjeux présents sur la zone considérée. » Cela pourrait-il vouloir dire qu’une ou deux éoliennes flottantes pourraient avoir quelques chances ? Peut être… mais quel intérêt dans ce cas d’installer 3 éoliennes en Méditerranée ?! Aucun bien sûr si ce n’est de discréter un peu plus l’éolien et de braquer le public contre lui par un maillage misérabiliste, détestable et absurde. Et l’Etat de continuer sur le mode de la carotte et du bâton : » Les deux autres zones significatives de potentiel technique en terme de superficie (au large de la Camargue et sur les côtes du département des Pyrénées Orientales) sont aussi marquées d’un niveau de sensibilité majeur. Mais même si ce niveau n’exclut en aucun cas l’implantation d’éoliennes, ces zones ne peuvent être considérées au stade actuel comme propices à l’examen de projets. En effet, ces deux zones sont des secteurs de mise en place d’aires marines protégées. »
Allez hop .. on a compris…basta cosi !
Et encore ne vous ai-je même pas parlé des fonds marins qui s’enfoncent très rapidement en Méditerranée à des profondeurs importantes et interdisent de ce fait l’implantation d’éoliennes offshore sur fondation à + ou – 20 km des côtes. Il existe bien des éoliennes flottantes prévues por ces configurations particulières mais après toute l’armada dissuasive de radars et de sémaphores déployé par l’État français pour protéger SA Méditerranée, à quoi bon les évoquer ? Comme je vous le disais au début de ce post, si après avoir pris connaissance de cela, vous êtes un porteur de projet qui veut s’aventurer en Méditerranée française c’est que vous êtes pour le moins… fada. Il y en a et il en faut … Sinon vous pouvez toujours allez voir en Espagne : leur Méditerranée n’est pas la même que la nôtre, c’est bien connu aussi…
Je rappelle les outils internet à la disposition du public concernant l’éolien en mer en France et en particulier en Méditerranée
– Une adresse ICI qui permet le dépôt de toutes questions relatives au processus de concertation. Elle permet également l’envoi de contributions écrites pour participer aux débats liés à l’implantation de l’énergie éolienne en mer.
– Un site internet ICI, de la direction régionale des affaires maritimes PACA, en charge du secrétariat de l’instance de concertation, un onglet dédié permet d’accéder à tous les comptes rendus des réunions de l’instance, et des différents groupes de travail. Y sont également accessibles (à condition de diposer de pas mal de temps pour les trouver!) les présentations sur support informatique effectuées par les intervenants lors des réunions.
Article : Francis ROUSSEAU
Docs Sites Liés. Carte 1 : Geolittoral en rouge les zones d’exclusion de l’éolien offshore. 2 Photo satellite de la Méditerranée et de la Mer d’Alboran dans l’axe du Détroit de Gibraltar. 3. Fonds marins des façades maritimes françaises et européennes. 4. Carte du relief de la Mer Méditerranéee.
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